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Frumette à cheveux longs et idées courtes
27 mars 2023

Ma plus belle histoire d'amour

alya

Texte écrit il y a 4 ans pour l'anniversaire de mon premier voyage en Israël. En cette période de forte tension qui déchire mon pays, je suis heureuse de me rappeler pourquoi je suis là. 🇮🇱💙

"Je me rappelle. Je me rappelle de tout. De la multitude des drapeaux et de la douceur des pierres.

C'était en 2007. J'avais 15 ans. C'était mon premier voyage. Je ne connaissais Israël que par les livres. Et par cette attrait du fin fond de l'âme. Je me rappelle de cette attirance aussi évidente qu'inexplicable pour une terre sur laquelle je n'avais jamais mis les pieds. Je me rappelle que j'aurais tout donné pour un pays que ne n'avais jamais vu.

Je me rappelle de cette première heure passée en Israël.
"Quand l'Eternel ramena les captifs à Sion, nous étions comme en rêve!" Tehilim 126.1. Je ne connaissais pas ce psaume, d'ailleurs je ne savais pas encore ce qu'étaient les Psaumes.
Mais je vivais ce rêve éveillé, l'âme grande ouverte, une impression paradoxale d'être arrivée au cœur du réel, si réel que c'en était irréel.

Je me rappelle de ce premier autobus et ces centaines de drapeaux, partout sur la route qui nous menait de l'aéroport à Jérusalem. A chaque rétroviseur un drapeau, à chaque balcon, un drapeau. Normal diriez-vous. A l'approche de yom aatsmaout, la fête de l'indépendance et comme chaque année tout le pays se revêt de drapeaux bleu blanc, les voitures, les balcons, les magasins. Nous étions juste avant Pessa'h et si j'étais restée plus longtemps que ces quelques jours, j'aurais alors vu la quantité de drapeaux encore augmenter les semaines suivantes.
Mais à l'époque tout cela bien sûr je ne le savais pas. Je n'avais jamais mis les pieds dans ce pays. Je ne savais rien de sa culture. En France à part pour les match de football (et quelques fanatiques du FN) personne ne déploie de drapeaux. Je vivais ma toute première heure en Israel, éblouie par tous ces drapeaux bleu blanc le long de la route, qui avaient l'air de m'accueillir. Comme s'ils étaient là pour moi, pour pour me dire "Bienvenue à la maison", après tous ces mois où je n'avais rêvé qu'en bleu et blanc.

Je me rappelle de ma première foi(s) au Kotel (Mur des Lamentations). Je me rappelle de la sensation physique en touchant les pierres pour la première fois. Cette sens à Sion des pierres si douces, m'avait surprise alors que j'avais imaginé que la pierre serait rugueuse au toucher. C'était la première fois que je touchais une pierre qui était douce. Douce, adoucie, usée, par les siècles, l'espoir et les larmes.
Quand les mains s'attendent à une matière brute, dure, et poreuse, c'est un baume que cette première douceur des pierres bimillénaires où l'on peut parfois apercevoir les colombes qui y nichent.
Des pierres à l'écoute des mains qui la caressent, des lèvres qui s'y posent. Comme si les pierres étaient devenues p(r)ières. Ou peut-être l'inverse.

Six mois après ce voyage je suis partie de France. Ou plutôt je suis rentrée après 2000 ans. Mes parents ont eu l'immense courage et l'amour de laisser partir leur fille de 15 ans (et demi bientôt 16 Maman!) vivre dans un pays inconnu, sans personne de leur ou de ma connaissance qui pourrait prendre soin de moi, sans parler un mot d'hébreu.
J'aurais pu mourir pour ce pays avant d'y poser un pied. J'ai choisi quelque chose d'encore plus difficile, vivre pour et dans ce pays, qui est une vraie histoire d'amour.

Car oui c'en est une. Au départ cette évidence, cette attirance physique, magnétique qui pousse à ne vouloir faire qu'un avec l'être aimé. La passion de Sion. Au début d'une amour tout est magnifique n'est ce pas? Israël mon amour est le plus beau pays du monde, notre armée la plus morale, nos soldats les plus beaux, nos tomates cerises crées en Israel les plus goûteuses, et la Torah d'Israel la plus vraie.

Et bh, heureusement que j'avais cette passion, cet enthousiasme de Lune de Miel. Il en faut de la passion pour surmonter à même pas 16 ans d'être seule sans famille sans la langue, sans amis, d'être trimballée de famille d'accueil en famille d'acceuil chaque shabat (et à l'époque il n'y avait pas de smartphone, je devais biper ma famille pour qu'on me rappelle sur une cabine téléphonique publique). Mais je le savais avant de partir que ce serait ainsi, qu'il y aurait de jours où je pleurerai, où je me demanderais ce que je fiche là, la première année sans amis, moquée par tous les chalalas. Savoir à l'avance qu'un couple c'est du travail, un choix, et des disputes aussi, cela aide à surmonter les crises et les inévitables moments d'abattement.

Puis avec les années et la vie quotidienne on découvre les défauts des qualités de l'objet de notre amour.
Après la paSion, la première désiluSion. Si salutaire. C'est l'opportunité de construire un amour plus vrai, basé non sur la projecSion enthousiaste de nos idéaux mais sur la connaissance de l'Autre, malgré ses défauts et peut être aussi pour ses défauts. Aimer l'autre pour ce qu'il est. Mon pays n'est pas parfait mais c'est lui que j'aime. Plus je le connais, plus je connais ses défauts et plus je l'aime. Et c'est le plus beau parce-que c'est lui. Car dans une vraie histoire d'amour, plus on connaît et plus on aime.

Et passées les premières désillusions on redécouvre les qualités de ses défauts. Différemment. Et c'est la même passion qu'au début, plus enracinée, plus vraie qu'avant.
On ne doit jamais chercher à changer l'autre en notre conjoint rêvé mais l'accompagner à devenir la meilleure version de lui-même: par exemple il est aussi vain qu'inexact par nature de chercher à importer les qualités françaises en Israël. Je cherche plutôt, à mon humble niveau, à contribuer à ce qu'Israël se développe au maximum de ce qu'il est et peut être. Israël mon amour, mon tout jeune pays qui va si vite, tellement en avance sur la technologie, sur l'autisme, sur l'étude des femmes, sur la recherche universitaire ou médicale... Et tellement en retard lorsqu'il s'agit de construire un tramway, commander un document administratif, recevoir un colis par la poste, ou faire un déménagement.

Oui les explorateurs de chelah Leha n'avaient pas tort : c'est un pays qui peut avaler ses habitants. Ici il faut se battre constamment. Collectivement et individuellement. Pas de vacances. Il faut se battre pour tout. Se battre pour que le pays miracle vive. Se battre pour ne pas se faire doubler dans la queue. Se battre pour que le chauffeur de bus s'arrête à l'arrêt auquel il est sensé s'arrêter. Si les Israéliens et Israéliennes n'avaient pas ce tempérament il n'y aurait pas de pays. Alors on se bat. Pour tout. Pour rentrer chez soi, pour payer son loyer, pour un rendez vous chez le médecin, pour travailler en étant âgé car en pratique la retraite à je crois 67 ans ne permet pas de vraiment s'arrêter de bosser sans finir à la rue, il faut se battre pour essayer d'avoir un résultat d'élection qui nous donne un gouvernement qui dure au moins 2 ans, il faut se battre pour que la banquière arrête de manger son cottage et vienne faire ce pour quoi elle est payée (sans toucher ma nouvelle carte bancaire avec ses doigts de cottage), se battre pour ne pas perdre sa place dans la queue, se battre même pour les choses auxquelles on est sensé avoir "droit".

Ce pays il est épuisant exténuant, je galère touts les jours pour les choses les plus simples. On me demande souvent si je ne veux pas retourner, revenir (en France). Mais moi je suis déjà "revenue". Ma תשובה mon retour, fût spirituelle mais aussi physique, תשובה du mot לשוב du mot ישוב (dans lequel j'habite) et c'est la seule réponse תשובה que j'ai (car le judaïsme est une question dont la pratique et l'étude apportent moins de réponses que de questions).
Je ne dis pas que la vie est facile en France. Mais elle est quand même beaucoup plus facile. Il y a le dimanche, il y a une variété de produits à prix abordables, il y a les congés payés, la Sécu et la retraite à (seulement !) 64 ans. Quelle utopie pour un israélien. Ils me demandsent souvent comment j'ai quitté tout ce luxe.
Je réponds que la diaspora c'est comme aller à l'hôtel, tout est plus simple, plus aisé et reposant à l'hôtel. Mais on revient toujours à la maison, dans son foyer. Aucun hôtel ne vaut la maison même après 2000 ans. Et Israël c'est le seul foyer juif.
Alors je préfère une caravane sur cette terre (j'exagère mais j'en suis pas si loin) qu'un palais de princesse ailleurs.

Ce fût la meilleure décision de ma vie, ma première et ma plus belle histoire d'amour. J'avais 15 ans. Ma première fois en terre d'Israël. Pour ne plus jamais la quitter💙🇮🇱

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